Asperges

C’est sans doute le légume que l’on retrouve avec le plus grand plaisir quand arrive le joli mois d’avril. Violettes, vertes ou sauvages, elles doivent être consommées très fraîches et cuites avec soin, pour en préserver la saveur et la douce amertume.

Parmi les nombreuses espèces existant à l’état sauvage, c’est asparagus officinalis qui fut domestiquée et perfectionnée pour obtenir la merveille que nous connaissons aujourd’hui. 
Elle était déjà consommée dans l’Egypte ancienne, ce qu’attestent certaines fresques de la Vallée des Rois, avant de se répandre tout autour du bassin méditerranéen. 
Curieusement, la France et le nord de l’Europe l’ignorèrent longtemps comme aliment, se contentant d’en apprécier les vertus médicinales (comme en témoigne son nom latin). Il fallut que Catherine de Médicis la ramène de Florence, lorsqu’elle épousa le futur Henri II, pour que notre pays l’adopte. Et quel succès ! Louis XIV en était fou, et ce capricieux exigeait de ses jardiniers qu’ils lui en fournissent dès le mois de décembre !
La couleur de l’asperge ne vient pas d’une variation génétique, mais de modes de culture différents. Dans tous les cas, la partie comestible est la pousse issue d’un rhizome (que les jardiniers et les maraîchers appellent griffe) repiqué à faible profondeur dans une terre très sablonneuse. La tige s’allonge verticalement à la recherche du soleil, et peut être récoltée à trois moments différents :
– Totalement enterrée, elle n’a pas eu le temps de faire la photosynthèse, ce qui donne l’asperge blanche
– Cueillie alors que le bourgeon est à peine sorti, elle sera violette
– Entièrement sortie de terre, elle sera verte
Ce qui donne des saveurs différentes et des usages culinaires variés. Pour ma part, je place l’asperge violette au-dessus du lot, s’il s’agit de la manger chaude, tout en appréciant les vertes encore croquantes dans une salade, froides ou tièdes. On trouve parfois sur les marchés des asperges sauvages, si fines que l’on peut les manger crues, ou rapidement sautées à la poêle.
Il faut choisir des asperges fraîchement cueillies, et fuir si des crevasses apparaissent à la base des tiges, signe de dessèchement. Le bourgeon doit être bien serré, et la peau brillante. Les meilleures asperges violettes (ou blanches) sont les plus grosses, car elles seront moins fibreuses et plus tendres.
Contrairement aux asperges vertes lorsqu’elles sont fines et fraîches, les asperges blanches et violettes doivent être épluchées, à l’aide un bon économe que l’on fera glisser du bourgeon vers le pied, en tenant la tige à plat plutôt que dans le creux de la main, ce qui évitera de les casser. Il faut enlever quelques centimètres à partir du pied pour se débarrasser de la partie la plus ferme et fibreuse.
Les asperges peuvent être pochées dans l’eau ou le bouillon, mais je les préfère à la vapeur, qui préserve mieux le goût et les qualités nutritionnelles du légume, et nécessite moins d’égouttage. Au sortir du cuit vapeur, lorsqu’elles sont tendres sous la fourchette, posez-les sur un linge quelques secondes avant de les mettre dans les assiettes de service.
Les asperges vapeur sont délicieuses avec de la crème épaisse simplement fondue dans une casserole avec un tour de poivre et un peu de sel. Plus sophistiquée, la sauce mousseline consiste à alléger une mayonnaise avec les blancs des œufs montés en neige. À faire au dernier moment pour éviter qu’elle ne retombe.
On peut encore cuire les asperges dans le fond blanc, sur le fond d’une sauteuse couverte et à feu doux, en les retournant de temps en temps. Le jus va réduire et servira de base à la sauce d’accompagnement, tout simplement en y ajoutant de la crème fraîche et en fouettant avec un mixeur plongeant pour donner une consistance mousseuse.
On peut aussi réaliser un velouté en mixant les asperges elles-mêmes, avant de les passer au chinois étamine pour éliminer les fibres, et d’ajouter de la crème fraîche, du sel, du poivre et un trait de jus de citron.
Je m’arrête là, car je pourrais passer la nuit à vous parler de ce légume des dieux. Et il faut bien garder quelques recettes pour la suite…
Seul désagrément de l’asperge : l’odeur très particulière qu’elle confère à l’urine, attribuable à la présence de six composés soufrés qui proviennent de la dégradation de certains acides aminés contenus dans la plante. Et comme ce légume est assez diurétique… Il n’existe à ma connaissance aucun moyen de lutter contre ce fléau.

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